Emmanuel Macron, la « nouvelle » ancienne « nouvelle politique africaine »
Au nord, peu de nouveau : avec sa traditionnelle autosatisfaction mais une humilité plus inattendue, le président français a exposé la stratégie future de la France envers le continent africain. Politique remaniée sans être inédite.
À l’heure des bilans, Emmanuel Macron invoquera certainement une succession d’empêchements, ses réformes contrariées par de jaunes gilets, par une pandémie inopinée ou par un « tsar » belliqueux.
Quoi de plus classique, ses prédécesseurs étant légitimes à évoquer, eux, tel attentat ou tels subprimes ? Sur le terrain africain, le héraut de la « start-up nation » se sera rêvé labrador dans un jeu de quilles, surplombant les dirigeants ankylosés pour s’adresser directement à la jeunesse du continent, hôte ouagalais ou convive montpelliérain.
Chantre de la rupture par la jouvence en costume-cravate, le Macron réélu connaîtra plutôt une disjonction d’avec une jeunesse en tee-shirt élimé et treillis. Avec toute la réserve que mérite l’emploi des mots « jeunesse », « peuple » ou « opinion » dans des pays aux sondages embryonnaires. Et avec les nuances géographiques qui s’imposent, la zone malo-burkinabè n’étant pas le Sahel et le Sahel ne résumant pas l’Afrique.
Côté « cash », droit dans ses chaussures Weston Richelieu, le chef de l’État a revendiqué le bousculement des tabous, mettant en bouche les mots qui râpent la langue de bois : « Wagner » qui ne sèmerait « que le malheur », « la Françafrique » qui ne lui inspirerait aucune nostalgie ou encore le concept de « pré-carré » français qu’il juge anachronique.
Sur le terrain du trompe-l’œil, Emmanuel Macron enfonce les mêmes clous : il change les mots en pensant modifier la réalité, évoquant davantage des « académies militaires » que des « bases » ; il souhaite une multiplication des restitutions d’œuvres d’art incrustées dans une « loi cadre » ;
il met à l’index le « défi démographique » africain à propos duquel ses anciens propos avaient froissé ; presque gaullien a défaut d’être gaulliste, reprenant en miroir les mantras des nouveaux patriotes africains comme « montée en puissance », il évoque l’indépendance à l’égard du franc CFA, avec un discours qui ressemble à la formule « qu’ils la prennent » du général de Gaulle. Et Macron d’enfiler des perles qui ne mangent pas de pain quand on n’y répond pas précisément : défi sécuritaire, consolidation des États, éducation, santé, entrepreneuriat, formation ou encore transition énergétique…
Au final, composant avec une réorientation géographique bien obligée, le chef de l’État ne se trahit-il pas, en appelant « à considérer les partenaires africains comme des partenaires à part entière » ? N’était-ce donc toujours pas le cas ?