Au Niger, des ressortissants européens refoulés à leur arrivée à l’aéroport

En 2019, l’UE avait formé des garde-frontière nigériens.
© EUCAP Niger

Les militaires au pouvoir, qui ont annoncé, avec le Mali et le Burkina Faso, leur départ de la Cédéao, multiplient les mesures de rétorsion contre des membres de la communauté européenne et contre les Français.

La junte nigérienne a ordonné vendredi l’expulsion, sous 72 heures, de 15 membres du personnel d’ Eucap Sahel Niger  , une mission civile de l’Union européenne de soutien aux forces de sécurité intérieures, basée à Niamey.

Le ministre de l’intérieur, le général de brigade Mohamed Toumba, a notifié l’ordre à la cheffe de la mission par une lettre le 26 janvier dernier.  « Il m’a été donné de constater que quinze de vos personnels militaires sont revenus à Niamey par divers vols le 24 janvier passé, sans informer au préalable le gouvernement» , a indiqué le ministre d’État, dans le document partagé par la junte mardi sur la plateforme X (ex-Twitter). La cheffe de la mission, la diplomate allemande Katja Dominik, a elle-même été refoulée à son arrivée à l’aéroport de Niamey dans la nuit du samedi 27 janvier.

Début décembre, après avoir pris le pouvoir par un coup d’État, les militaires ont mis fin à la mission d’Eucap Sahel au Niger, créée en 2012 dans le pays pour former et appuyer les forces de sécurité intérieures nigériennes en équipement. La junte avait alors donné six mois à la mission, composée d’environ 120 personnels européens, pour partir.

Selon l’Union européenne, la cheffe de mission avait remis un plan de retrait détaillé aux autorités, à leur demande, qui n’a pas fait l’objet d’objection.  L’accord reste quoi qu’il en soit en vigueur jusqu’au 3 juin 2024 et jusqu’à cette date, prévoit que les entrées et sorties du staff Eucap soient facilitées , a souligné une porte-parole, ajoutant que l’UE avait  demandé des explications  à Niamey. L’Union européenne indique également avoir pris note de  la confiscation des passeports de plusieurs membres de la mission  arrivés dans la capitale le 24 janvier dernier.

Les Français visés

En plus du personnel d’Eucap Sahel Niger, plusieurs Français ont été refoulés à leur arrivée à l’aéroport de Niamey le week-end dernier. Pour l’heure, ni les autorités françaises ni la junte au pouvoir n’ont communiqué sur ces cas.  Il n’y a eu aucune directive officielle de refouler systématiquement les Français à leur arrivée au Niger, même s’il peut y avoir des cas isolés , assure une source gouvernementale.

Mais à Niamey, l’inquiétude grandit au sein de la communauté française vivant dans le pays. RFI rapporte qu’ au moins cinq  Français ont été empêchés d’entrer sur le territoire nigérien depuis jeudi dernier, dont le responsable du Programme alimentaire mondial (Pam), pourtant muni d’un passeport diplomatique des Nations unies.

Samedi 27, une Française, qui préfère garder l’anonymat, rapporte elle aussi avoir été bloquée à la sortie de l’avion, malgré son visa en règle.  Les policiers m’ont mise de côté. Ils ont passé des coups de fil, ça a duré plusieurs heures puis ils sont revenus pour me dire que j’étais refoulée. Ils ne m’ont donné aucune explication, ils ont juste dit que c’était un ordre qu’ils avaient reçu , raconte cette Française, obligée de repartir avec le premier vol du lendemain matin, après avoir passé la nuit dans l’aéroport.

Ces dernières semaines, les contrôles ont été renforcés pour les Occidentaux à l’entrée du territoire nigérien. Selon nos informations, plusieurs ressortissants français ont également vu leurs passeports confisqués par la police aux frontières puis gardés à la Direction de la surveillance du territoire (DST) pour  une enquête complémentaire , après avoir été questionnés sur leur travail.

Article de De notre correspondante à Niamey, Sophie DOUCE.